3 juin 2024

À quelques jours des élections européennes, examinons de plus près les échanges politiques français sur X.

Nous avons collecté les messages des principales personnalités politiques et militantes sur le mois de mai 2024 afin d’étudier la structure des échanges depuis que X a fermé l’accès de ses données aux chercheurs. La procédure de collecte est cette fois différente et moins massive que les analyses précédentes du Politoscope.

En reconstruisant le graphe des interactions et des communautés, nous observons néanmoins une structure similaire à celle rapportée jusqu’en 2023 : espace politique en ligne organisé autour de trois piliers : LREM, LFI et le trio RN/Reconquête/Patriotes-UPR qui se divise le travail à l’extrême-droite (attention, les liens sont non dirigés sur ces cartes, leur couleur n’est pas significative). Il y a cependant des nuances très importantes dans l’organisation des échanges d’un sujet à l’autre, avec sur certains sujets, une distribution très différente de la circulation des discours.

Sur la carte globale des échanges ci-dessous, nous avons mis en avant les expressions spécifiques à chaque communauté afin de donner une idée des nuances de discours et des centres d’intérêts.

  • Paul Bouchaud, CNRS/CAMS-ISC-PIF
  • David Chavalarias, CNRS/CAMS-ISC-PIF

La guerre à Gaza

Dans les publications concernant Israël-Palestine, une première division gauche/droite met en avant des différents sur la question de la condamnation de l’armée israélienne et du respect du droit international. En particulier, la majorité présidentielle et les groupes de droite reprennent les messages de l’ambassade israélienne et sont critiques vis-à-vis des manifestations pro-Palestine à SciencesPo alors que des medias comme Al Jazira trouvent une certaine audience dans une partie de la gauche. L’analyse plus fine des communautés révèle cependant des nuances importantes au-delà de ce premier éclairage.

La communauté LFI, qui semble cohésive de prime abord est en fait divisé en deux communautés. Le RN et Reconquête forment quant à eux une communauté cohésive avec des thèmes communs.

Alors que la majorité de la communauté Renaissance se retrouve avec une partie de LR, Emmanuel Macron et Valérie Hayer semblent sur une position intermédiaire, dans la même communauté que le PS et Place Publique.
Une communauté Pro-Kremlin est très bien visible dans la proximité directe de LFI, tandis que les communautés PCF et EELV sont chacunes bien identifiées.

On voit donc bien que la question de la guerre à Gaza dépasse les lignes traditionnelles des partis politiques et créé même des frontières à l’intérieurs de certains partis, pouvant éventuellement être un facteur de reconfiguration politique à moyen terme si elle était amenée à se poursuivre.

La guerre en Ukraine

Marine Le Pen posant pendant la campagne de 2017 dans le QG du Front Nationale devant un typtique offer par l’activiste d’extrême-droite pro-poutine Maria Katasonova.

La guerre en Ukraine est un autre thème qui amène à des convergences de discours ou des fractures inhabituelles. La majorité présidentielle et les partis de gauche modérés (PS, EELV), qui condamnent clairement l’agression du Kremlin, forment une communauté très cohésive. Parallèlement, LFI et les partis pro-Kremlin d’extrême droite alternative et souverainistes (Patriotes, Reconquête, UPR), qui plaident pour un cessez-le-feu et s’opposent à l’envoi de troupes françaises en Ukraine,  se regroupent assez vite dans une même communauté (en terme de résolution de clustering).

De manière intéressante, le RN, dont la communauté en ligne est très réduite par rapport à son importance dans les urnes fait bande à part avec une partie des Républicains, une manière peut-être de rester sur la réserve sur un sujet qui peut vite tourner en leur défaveur en raison de leur passif.

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